Pour qui la fève ?
Chaque année en janvier, il était de coutume que les adhérents de l'UPV se retrouvent pour partager la traditionnelle Galette des Rois dans une chaleureuse convivialité. En 2021, Covid 19 oblige, on se contentera d'une galette toute virtuelle pour maintenir la tradition. D'ailleurs, d'où vient cette dernière ?
A l'époque romaine se déroulait une grande fête en l'honneur du dieu Saturne, appelée les Saturnales, une semaine avant le solstice d'hiver annonçant l'allongement des jours. Dans la familia,l'autoritédes maîtres étant suspendue durant cette courte période, les esclaves étaient alors autorisés à ne pas travailler, bénéficiaient d'une certaine liberté, pouvaient les critiquer, prenaient le repas à leur table. Au cours du banquet, les esclaves partageaient un gâteau où était cachée une fève pour tirer au sort le « Saturnalicius Princeps » (le « Prince des Saturnales »). L'esclave chanceux était déclaré « roi d'un jour », pouvait exaucer tous ses désirs durant cette journée avant de retourner à sa vie servile.
Lorsque le christianisme s'est imposé à l'époque de l'empereur Constantin, la naissance de Jésus était fêtée au moment du solstice d'hiver qui annonçait symboliquement le renouveau, suivie de l'Epiphanie (en grec « l'apparition ») correspondant à la visite des Rois Mages lui offrant des cadeaux, selon les Evangiles.
A partir du Moyen-Age, la coutume du gâteau dit « des Rois » se répand chez les catholiques français, n'est pas acceptée par les calvinistes et les luthériens qui la trouvent trop païenne, mais perdure jusqu'en 1789.
Au moment de la Révolution Française, il paraît aberrant de partager ce fameux « Gâteau desRois », encore moins de désigner un roi tiré au hasard ! On crée alors la « Galette de la Liberté » ou la « Galette de l'Egalité » sans la fève. Avec l'instauration du calendrier républicain remplaçant le calendrier chrétien, il était même envisagé de renommer l'Epiphanie « Fête du Bon Voisinage », « Fête des Philosophes » ou mieux « Fête des Sans Culottes » !
Après l'exécution du roi Louis XVI et de la reine Marie-Antoinette, le mot « roi » et « reine » disparaissent du vocabulaire courant. Par exemple, dans le jeu de cartes, le roi de carreau est remplacé par le « Génie du Commerce » et devient le « Tyran » dans le jeu d'échecs, la reine de cœur étant « Liberté des Cultes »...
Les années passent...mais la tradition bien française de la « Galette des Rois » a encore de beaux jours devant elle ! Selon un sondage, 85% des Français ne dérogent jamais à la coutume de « tirer les rois » en famille avec la vente, en janvier, de 30 millions de galettes garnies de ses 2 fèves pour le roi et la reine d'un jour.
Une seule exception : le boulanger attitré au Palais de l'Elysée ne garnit jamais de fève ses galettes et pour cause : Le Président de la République française découvrant une fève dans une galette bien républicaine deviendrait le « roi d'un jour »...Néanmoins, il est à noter qu'il possède toujours le statut de Coprince d'Andorre avec le Coprince épiscopal, l'évêque d'Urgell !...
Alain JAMMET