Il ne fallait surtout pas bouger
Parfois, grâce à ma petite mémoire, je me revois en train de poser pour Henri Roche, peintre local dont une rue de Lamastre porte le nom. J'avais entre 6 et 8 ans et je me souviens bien de lui. Il habitait sur la route de Valence. Il montait à pied par le Chemin des Martyrs en direction de l'église de Macheville avec son chevalet, son tableau en toile, sa palette de gouaches, sa petite chaise pliable en tissu pour arriver jusqu'à chez moi, à 2,5 km environ.
C'était un grand homme habillé en velours vert à grosses côtes, des guêtres, un pantalon large juste au-dessus qu’il réglait grâce à des petites lanières. Il portait une casquette gavroche inclinée. Il se démarquait d'entre nous, simples paysans.
J'habitais au Buisson d'Urbilhac, hameau où je suis né. Il venait m'y chercher pour me poster avec précision dans les escaliers en pierres. Je devais y rester une heure ou deux sans bouger, de façon à avoir mon portrait le plus naturel possible (avec les ombres) ! Pour moi c'était très difficile et languissant surtout avec les mouches qui me piquaient.
Ce coin pour lui était vraiment extraordinaire étant donné qu’il y avait une cour intérieure ceinturée par des portes voûtées de part et d'autre en très belles pierres. Dans cette enceinte logeaient des vaches, des chèvres et des poules. Pendant que je posais, des chiens venaient me lécher, les poules grattaient le sol en sautillant sur des petites brindilles de bois tombées des fagots que l'on donnait aux chèvres ! Et… je devais toujours rester immobile...
Je n'ai jamais vu ses tableaux finis, quel dommage ! Il me disait qu'il les exposait dans la région parisienne...
Gilbert MANEVAL
Il se pourrait que ce soit Gilbert sur ce tableau.
Là, pas de doute, ce n’est pas Gilbert.