Trois gros rats gris…
Je suis née à Nevers, et pratiquement toute ma famille, paternelle comme maternelle, est originaire de la Nièvre. L’accent morvandiau roulait beaucoup les R. Ma mère et sa sœur les roulaient légèrement ; le téléphone accentuait beaucoup, et quelquefois, on leur demandait si elles n’étaient pas Polonaises !
En vacances chez ma tante, qui était gaie et pleine de fantaisie, nous lui demandions : « Naine, fais-nous les trois gros rats gris ! »
Et c’était parti :
« trrrrrois grrrros rrrrats grrrrris dans trrrrois grrrrros trrrrrous rrrrronds ! »
Une avalanche de cailloux dégringolait de sa bouche ; nous nous tordions de rire. Et mon oncle fulminait :
« Tu vois bien que ces gamines se fichent de toi ! »
Mais elle s’amusait autant que nous à ce jeu et s’y prêtait volontiers.
Et souvent, je m’essaie à dire « les trois gros rats gris », mais ce sont deux malheureux petits cailloux de rien de tout qui s’échappent de mes lèvres ! Je suis partie trop petite de la Nièvre, je me suis frottée à trop d’autres accents pour savoir faire cascader les R comme une vraie Morvandelle.
Odile MONTÉRÉMAL
Trois gros rats (g)rient….